L’histoire du secteur des assurances en Afrique francophone, et plus particulièrement en Côte d’Ivoire, est intimement liée à la période coloniale et à l’essor des activités commerciales des puissances européennes. Dès le début du XXe siècle, les premières opérations d’assurance sont assurées par les comptoirs commerciaux des maisons européennes implantées dans la région, principalement pour protéger leurs investissements industriels et commerciaux.
Les prémices : des compagnies étrangères aux premières réglementations
Avec le développement économique, les compagnies d’assurance étrangères s’implantent sous forme d’agences ou de succursales. À l’approche des indépendances dans les années 1959-1962, la France, ancienne puissance coloniale, initie des démarches pour structurer et orienter le secteur des assurances en Afrique francophone. Dès 1959, la Direction des Assurances de France organise des rencontres et stages destinés aux représentants des pays de la zone franc, qui aboutissent à l’élaboration des premiers textes réglementaires.
En Côte d’Ivoire, la loi n°62-232 du 29 juin 1962 réglemente la profession d’assureur, tandis que l’obligation d’assurance automobile est instituée dès 1962 par la loi n°60-342 et son décret d’application. Ces premières réglementations posent les bases d’un cadre juridique national, tout en s’inscrivant dans une dynamique régionale.
La naissance de la CICA et l’africanisation du secteur
Le 17 juillet 1962, une convention signée à Paris entre treize États africains et la France crée la Conférence Internationale des Contrôles d’Assurances (CICA), dont la mission principale est d’harmoniser la réglementation des assurances dans la zone franc. En 1973, une nouvelle convention remplace la précédente, marquant le retrait progressif de la France et le transfert du siège de Paris à Libreville en 1976. Cette étape symbolise l’africanisation du secteur, avec un accent mis sur le développement des marchés nationaux d’assurance.
À partir des années 1970, la CICA encourage la constitution d’entreprises d’assurance locales, notamment des mutuelles comme la Mutuelle Agricole de Côte d’Ivoire (MACI). L’État et les acteurs privés nationaux prennent progressivement des participations dans les sociétés issues des portefeuilles des compagnies françaises, amorçant ainsi la montée en puissance des acteurs locaux.
La création de la CIMA : un cadre intégré pour le secteur des assurances
Le tournant majeur intervient en 1992 avec la signature, le 10 juillet à Yaoundé, du traité instituant la Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances (CIMA). Cette organisation intégrée regroupe quatorze États africains francophones, dont la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso et le Togo. La CIMA vise à harmoniser et unifier la réglementation, renforcer la supervision, et favoriser le développement d’un marché régional intégré.
Le traité CIMA, entré en vigueur en 1995, institue un code communautaire des assurances commun à tous les États membres, ainsi que des organes de gouvernance et de contrôle : le Conseil des Ministres des Assurances (CMA), la Commission Régionale de Contrôle des Assurances (CRCA) et le Secrétariat Général. Ces institutions assurent la cohérence et la régulation du secteur dans la zone, tout en favorisant la solidarité et la coopération entre les marchés nationaux.
Un marché en mutation et en expansion
Dans les années 1990, la Côte d’Ivoire comptait environ quarante compagnies d’assurance. Une politique d’assainissement a permis de réduire ce nombre, avant une nouvelle dynamique d’agréments. En 2022, le marché ivoirien comprend une trentaine de sociétés d’assurance, réparties entre assurances vie et assurances IARD (Incendie, Accidents et Risques Divers), soutenues par un réseau important d’intermédiaires, notamment plus de deux cents courtiers.
Le secteur s’appuie également sur la présence de réassureurs locaux et internationaux, renforçant la capacité de couverture des risques. Cette structuration témoigne de la maturité croissante du marché, qui reste cependant confronté à des défis liés à la gouvernance, à la gestion des sinistres et à l’adaptation aux réalités économiques et sociales régionales.
La Direction des Assurances de Côte d’Ivoire : un pilier central de la régulation et du développement du secteur
La Direction des Assurances (DA) de la République de Côte d’Ivoire est une administration centrale rattachée au Ministère de l’Économie et des Finances, placée sous l’autorité directe du Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité Publique. Elle joue un rôle clé dans la conception, la régulation et la surveillance du secteur des assurances, un domaine stratégique pour la protection des intérêts des assurés et la stabilité économique du pays.
Une organisation claire et des missions étendues
Selon l’arrêté n°0036/MEF/DGTCP/DEMO du 9 février 2017, la Direction des Assurances est chargée de la conception de la politique de l’État en matière d’assurance, de micro-assurance et de réassurance. Elle est dirigée par un Directeur nommé par décret et structurée en trois sous-directions spécialisées :
- La sous-direction du Contrôle des sociétés d’Assurances, qui supervise les compagnies d’assurance pour garantir leur conformité juridique, financière et technique au cadre réglementaire ;
- La sous-direction du Contrôle des Intermédiaires d’Assurances, responsable de la régulation des courtiers, agents généraux et autres intermédiaires, assurant le respect des règles de qualification professionnelle et de solvabilité ;
- La sous-direction des Agréments, des Études et des Statistiques, qui instruit les demandes d’agrément des acteurs du marché, réalise des études sectorielles et élabore les statistiques nécessaires à la bonne connaissance et au suivi du marché.
Un rôle de relais régional et de gardien du marché
La Direction des Assurances agit également comme relais national de la Commission Régionale de Contrôle des Assurances (CRCA), organe régional de supervision des marchés d’assurance des États membres de la Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances (CIMA). À ce titre, elle assure la promotion du secteur, la sauvegarde des intérêts des assurés et bénéficiaires de contrats, ainsi que la protection de l’épargne détenue par les compagnies d’assurance.
Elle veille à la bonne application de la législation unique CIMA, étudie les contrats d’assurance destinés au public, suit les litiges entre assureurs, assurés et bénéficiaires, et communique régulièrement à la CRCA les résultats des contrôles techniques et les données statistiques du marché. Par ailleurs, elle peut gérer les contrats d’assurance souscrits par l’État et veille à la rédaction adéquate de leurs clauses.
Un acteur clé pour la stabilité et le développement du secteur
La Direction des Assurances joue un rôle d’expert-conseil auprès des autorités nationales, contribuant à l’élaboration des textes législatifs et réglementaires, ainsi qu’à la préparation des accords internationaux en matière d’assurance. Elle assure aussi les liaisons avec les institutions étrangères et les organismes internationaux, renforçant ainsi la coopération régionale et mondiale.
Grâce à cette organisation rigoureuse et à ses missions étendues, la Direction des Assurances contribue à renforcer la confiance dans le secteur, à protéger les consommateurs et à favoriser un développement harmonieux et durable des assurances en Côte d’Ivoire.
225assurances, l’information de l’assurance en Côte d’Ivoire, 17 Mai 2025